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Une belle carrière ecclésiastique !

A la veille de sa mort à La Charité, au mois d’octobre 1619, « illustre et révérend père en Dieu messire Jean de Clèves, evesque de Bethléem, abbé de l’abbaye de Toussains en l’île de Chaalons, prieur seigneur de La Charité » fonda un anniversaire et cinq saluts dans l’abbaye. Son neveu et légataire Antoine de Clèves, comte de Rosoy, devait délivrer aux moines les sommes correspondantes (Source : Cartulaire de La Charité, édité par R. de Lespinasse).

Nous avons déjà rencontré ce personnage comme évêque de Bethléem à la suite de son oncle Louis, et noté son existence dans la généalogie des bâtards de Clèves. Il était le fils de Louis, sgr de Fontaine (à St-Père) ; le petit-fils de François, abbé du Tréport ; et donc l’arrière-petit-fils « par la main gauche » d’Engilbert, comte de Nevers.

Ses armes figurent sur la cheminée du petit manoir de Charly à Chaulgnes, possession des prieurs de La Charité : « Ecartelé: aux 1 et 4, d’azur, à trois fleurs de lys d’or, à la bande de gueules, chargée de trois lionceaux d’argent, brochant sur le tout (qui est Bourbon-Vendôme); aux 2 et 3, contrécartelé, au 1 et 4, parti de gueules, au ray d’escarboucle, pommeté et fleurdelysé d’or de huit pièces, enté en cœur d’argent, à l’escarboucle de sinople (qui est de Clèves) et d’or, à la fasce échiquetée d’argent et de gueules de trois tires (qui est La Mark); et aux 2 et 3, écartelé d’azur, à trois fleurs de lys d’or, et de gueules à la bordure engrêlée d’argent (qui est d’Albret-Orval) ». (Source : Armorial de Soultrait, et Epigraphie héraldique du département de la Nièvre, par le Cte de Sornay-Soultrait)

Les armes de Bourbon-Vendôme, celles de son arrière-grand-mère qui faisait de lui un cousin du roi régnant, figurent curieusement en premier ; mais aucune allusion à la bâtardise dans cet écu sophistiqué.

A la vérité, cet aimable jeune homme, chanoine régulier de Saint-Augustin, n’avait pas eu à fournir de grands efforts pour obtenir ces fonctions : il avait succédé comme abbé de Bourras et de Toussaint de Châlons, comme Prieur de La Charité (en 1606) et comme évêque de Bethléem (en 1615) à son oncle Louis de Clèves.

Comme prieur de cette fille aînée de Cluny pendant 13 années, fonction à laquelle il ajouta celle d’évêque de Bethléem – il est vrai assez légère – il n’a laissé comme trace qu’une tombe dans le choeur.

Voyez à ce sujet la notice détaillée que nous proposons par ailleurs : Prieurs de La Charité

Mais Jean de Clèves avait aussi obtenu dans ses premières années des petits bénéfices en Donziais. Il est probable que son oncle avait « résigné » en sa faveur ces premiers titres, comme il résigna plus tard ceux de Bourras, de La Charité et de Bethléem.

Les ressources inépuisables du site « cahiers-du-val-de-bargis » – auquel nous avons souvent recours et que nous vous recommandons – nous le font retrouver comme prieur de Cessy en 1602 pour la vente d’une grange, ou pour le bail de la dîme de Cœurs :

« A tous ceulx qui ces p[rése]ntes lettres verront Philippes de Franay conseiller du Roy not[re] sire advocat au baill[ia]ge et siege presidial d’Aucerre, bailly de Cessy et St Malou les Boys et garde du scel estably aux contractz desditz lieulx pour noble et scientifique personne messire Jehan de Cleves conseiller et aumosnier du Roy not[re] sire abbé de Toussaintz en l’Isle de Challons et seign[eur] prieur spirituel et temporel desditz Cessy, St Malou les Boys, Coches et Viel Mannay, mambres et deppandan[ces] salut…… ».

Nous avons évoqué cette vieille abbaye relevant de St-Germain-d’Auxerre ; elle n’était plus que l’ombre d’elle-même après les ravages des Guerres de Religion, et il n’en reste rien. Ses biens et ceux subsistants de l’ancienne abbaye de Coche à Vielmanay ; ceux du prieuré disparu de Mannay ; et ceux détenus à Saint-Malo qui était dans la dépendance de Cessy, avaient été unis pour étoffer ce bénéfice et en faciliter l’administration. C’était devenu une quasi-seigneurie laïque sans présence monastique.

Il semble qu’en 1602 Jean de Clèves n’était pas encore abbé de Bourras – sur le territoire de cette même paroisse de Saint-Malo-en-Donziais – mais ce n’était que partie remise. Notons qu’il était dès cette époque « conseiller et aumônier du Roi », une charge héritée également de son oncle.

Les Clèves-Fontaine, oncle et neveu, nous fournissent un bel exemple du népotisme et de la simonie qui prévalaient alors. Il s’agissait d’obtenir du roi, grâce à un appui puissant – celui du duc de Nevers, en l’occurrence – des « bénéfices » procurant des revenus significatifs. On y renonçait de son vivant en faveur d’un neveu. On transmettait ainsi comme un patrimoine privé des droits sur des biens ecclésiastiques au nez et à la barbe d’un pouvoir royal complaisant. Il n’était pas interdit d’avoir une vocation religieuse et de s’y consacrer, mais ce n’était pas indispensable…

Ce scandale minait la confiance dans l’Eglise et dans ce pouvoir ; il perdura pourtant sur une grande échelle jusqu’à la Révolution.

Luther et surtout Calvin s’étaient élevés quelques dizaines d’années plus tôt contre ces pratiques. Leurs partisans avaient d’ailleurs détruit la plupart des monastères de la région, mais leurs biens fonciers étaient là et continuaient d’aiguiser les appétits.

Encore faut-il rappeler que certains huguenots connaissaient le système de l’intérieur : Jean de Marafin – frère de François, sgr de Vieux-Moulin, capitaine protestant de La Charité et lieutenant de l’Amiral de Coligny – avait été « abbé commendataire de Bourras et de Cessy » et « archidiacre de Decize » quelques années avant d’embrasser la Réforme. Théodore de Bèze lui-même, successeur de Calvin à Genève, dont la famille était implantée en Nivernais et en Donziais, n’avait-il pas bénéficié de la protection de son oncle Nicole de Bèze, « archidiacre d’Etampes, prieur commendataire de Mello, Abbé de Saint-Eptade de Cervon, Prieur du Val-Saint-Eloi à Longjumeau« ….etc. ?

Une époque décidément bien troublée et déliquescente…

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Fontaine, associé à Pougny

Le fief de Fontaine à Saint-Père, proche de Pougny auquel il était lié, revint sans doute aux comtes de Nevers ou fut racheté par eux après avoir été détenu par les Damas de Marcilly. Il fut sans doute attribué avec Alligny à Louis de Clèves, petit-fils du duc Englibert, vers 1550, comme un apanage de bâtard.

Il est mentionné par Marolles pour des hommages avec Pougny, par les Damas au XIVème siècle, puis cité au XVIème comme étant dans les mains de Louis de Clèves.

Près de l’actuelle maison de maître, une belle grange pyramidale subsiste dans ce domaine aujourd’hui viticole (où l’on vinifie notamment le fameux Pouilly-Fumé).

Voyez ci-dessous une notice à ce sujet, établie grâce à une indication initiale donnée par un fidèle et actif visiteur du site. Il reste encore beaucoup de choses à éclaircir ! Merci de votre aide !

Fontaine (St-Père) (V4 du 23 déc 2021)

 

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Les bâtards de Clèves

(Illustration : armes de Clèves-La Marck-Bourgogne)

En épousant Elisabeth, fille de Jean de Bourgogne, comte de Nevers (XVème siècle), les comtes de Clèves et de la Marck, grands vassaux des ducs de Bourgogne, chevaliers de la Toison d’Or, héritent de ce comté et des terres associées. Ils figurent donc dans la suite des comtes de Nevers, barons de Donzy.

Il se trouve qu’à un échelon inférieur on rencontre en Donziais des représentants de deux lignées bâtardes de Clèves :

  • celle d’Herman, sire d’Asnois, fils naturel de Jean II  ;
  • et celle de François, abbé commendataire du Tréport, qui, non content d’être un fils naturel d’Engilbert de Clèves, comte de Nevers, eut une nombreuse descendance.

Leurs membres se sont alliés dans la contrée et on les retrouve en différents sites, en particulier à Alligny près de Cosne, une terre issue des anciens barons de Saint-Verain.

Louis de Clèves, le fils de l’abbé du Tréport, est connu sous le nom de « seigneur de Fontaine« , une petite terre à Pougny (voir cette fiche) plutôt que la « fontaine d’Alligny », sur laquelle la belle église Saint-Saturnin fut bâtie, comme certains auteurs l’avancent…

Voyez ci-dessous une notice généalogique sur ces deux lignées.

Bâtards de Clèves

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Alligny, un fief de Saint-Verain

(Illustration : l’ancien château de Saint-Verain, gravure du XIXème siècle)

Le fief d’Alligny appartenait aux barons de Saint-Verain, et relevait à ce titre de l’évêque d’Auxerre. Il fut repris par les comtes de Nevers avec l’ensemble de cette baronnie au XVème siècle.

Il fut légué à un bâtard de François de Clèves, abbé du Tréport, le troisième fils d’Engilbert de Clèves, comte de Nevers, puis fit sans doute retour au duché à la fin du XVIème siècle. Il fut alors cédé à un avocat : Philbert Gillot, et conservé par ses descendants qui en prirent le nom.

Au-delà du nouveau seigneur d’Alligny lui-même, la famille Gillot, originaire de Langres, recèle des personnages très intéressants, qui ont marqué leur époque, et que nous vous invitons à découvrir dans la notice ci-dessous :

Gillot d’Alligny

Le château d’Alligny, bâtiment longiligne des XVIIème-XVIIIsiècles, ayant sans doute succédé à une construction plus ancienne, est situé au cœur du village, tout près de la vieille église. 

Voyez ci-dessous une première notice sur la succession des seigneurs d’Alligny, qu’il nous faudra compléter, avec votre aide…

Alligny (Version 5 complétée, du 30/11/22)

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Duc de Donzy ?

Lu dans les Mémoires de Saint-Simon « M. de Donzi, hors d'espérance d'être duc, avait cherché à y suppléer par un mariage. Il le trouva dans la fille aînée de J.-B. Spinola, gouverneur d'Ath et lieutenant général des armées de Charles II, roi d'Espagne, qui en 1677 le fit faire prince de l'empire et le fit enfin grand d'Espagne, de la première classe pour un gros argent qu'il paya. Il n'eut point de fils, il n'eut que deux filles dont l'aînée eut sa grandesse après lui, et que Donzi épousa, et prit d'elle, en se mariant, le nom de prince de Vergagne. Il fallait craindre, à la vie qu'il menait, de se méprendre et de dire Vergogne… »

Qui pouvait bien être ce sulfureux M. de Donzi, alors que la lignée de ce nom s’était fondue dans celle de Nevers en 1199 ? C’est une longue histoire.

Comme nous l’indiquons dans les pages consacrées à l’histoire de la baronnie de Donzy, ce fief ne disparut que dans la nuit du 4 aout 1789. Certes, depuis le mariage d’Hervé IV et de Mahaut de Courtenay, Donzy n’était plus le titre principal de ses descendants. Mais Nivernais et Donziais subsistaient côte à côte comme des grands fiefs distincts.

Les comtes successifs de Nevers, bien qu’appartenant à des maisons princières (Bourbon, Bourgogne, Flandre, Clèves) conservèrent précieusement le titre de « baron de Donzy ». Il existait bel et bien, et marquait le contrôle d’un territoire connu de temps immémoriaux sous ce nom, entre Nevers et Auxerre. Au-delà des revenus qu’assurait cette baronnie, on puisait alors sa légitimité dans ces références anciennes, qui faisaient courir les plumes des notaires.

Le partage de la succession de Jean de Bourgogne (1415-1491), duc de Brabant et comte de Nevers – petit-fils de Philippe Le Hardi – avait même séparé Donzy de Nevers pendant quelques décennies au début du XVIème siècle, confirmant sa singularité préservée.

François Ier de Clèves (1516-1562) fut le premier duc de Nevers (1539). Ses succès militaires et la faveur royale lui avaient permis d’obtenir cette dignité et celle de Pair de France. Il obtint ensuite l’incorporation de Donzy à son duché-pairie (1549-1553), lorsque la baronnie lui revint. Il fut dès lors, et ses successeurs après lui « duc de Nevers et de Donzy ».

                                                         

Donzy entrait avec Nevers dans sa période "italienne". Son gendre et successeur, Louis de Gonzague, Pce de Mantoue (1539-1595) et les descendants de ce dernier, furent appelés « ducs de Nivernois et de Donziois ».

Charles II de Gonzague (1629-1665) vendit le duché au Cardinal Mazarin en 1659. Celui-ci en fit aussitôt (1660) don à son neveu Philippe Mancini (1641-1707), capitaine des Mousquetaires du Roi, qui fut Gouverneur et Lieutenant général du Nivernais pour le Roi, alors que le Parlement, trouvant sans doute cette intégration un peu rapide, refusait d’enregistrer son duché. Il était le frère de la belle Marie Mancini dont le jeune Louis XIV s'était épris. Il avait épousé une héritière nivernaise, Diane Damas de Thianges, nièce de Mme de Montespan.

                            

François Mancini-Mazarini (1676-1768) son fils, d’abord titré marquis de Donzy, suivant un usage du temps, fut Prince de Vergagne et du Saint-Empire, Grand d’Espagne de première classe, puis duc de Nevers et de Donzy quand il put enfin faire enregistrer par le Parlement de Paris le duché que lui avait légué son père (1720). C’est le fameux « M. de Donzi » de Saint-Simon.

Son fils Louis-Jules (1716-1798), dernier duc de Nivernais et de Donziais – dès 1730 par démission de son père – fut un personnage remarquable des règnes de Louis XV et de Louis XVI, qu’il servit comme ambassadeur à Rome, Berlin et Londres. Il était le gendre de Pontchartrain, ministre de Louis XIV. Ecrivain et poète, il fut aussi membre de l’Académie Française.

                                                                

Ainsi Donzy, revenu sur le devant de la scène des grands titres nobiliaires, terminait sa longue carrière féodale en beauté.

 

 

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