Archives de catégorie : Autres sites du Nivernais

Villiers-le-Sec, mouvant de Varzy

(Illustration : Auxerre, cathédrale Saint-Etienne)

Villiers-le-Sec, entre Varzy et Clamecy, est aujourd’hui un petit village où aucune trace castrale n’est là pour rappeler qu’il a été un fief très ancien, relevant de la Tour de Varzy des évêques d’Auxerre. Pour cette raison il ne figure pas dans l’Inventaire des Titres de Nevers.

Château épiscopal de Varzy (vers 1900)

Villiers-le-Sec aurait été donné au chapitre de sa cathédrale, à l’époque de Charlemagne, par Maurin, 33ème évêque d’Auxerre de 771 à 799. « …A l’imitation de son prédécesseur de bonne mémoire (ndlr : Aidulf), il donna de ses biens propres à Saint-Etienne (ndlr : sa cathédrale et son chapitre) pour satisfaire les besoins des pauvres. Ces biens se trouvent dans le pagus de Tonnerre, dans la villa appelée Fontenay. Il y ajouta, pour l’entretien des chanoines, une petite terre dont il était propriétaire, appelée Villiers, non loin de Varzy, qu’il avait reçue d’une matrone appelée Rocla« . (Extrait de sa notice dans les « Gestes des Evêques d’Auxerre » (Tome I, Les Belles Lettres, Paris, 2006)

Ce fief a été détenu, dans des conditions qui restent obscures, soit par inféodation du châpitre d’Auxerre, soit par usurpation aux premiers temps de la féodalité, par les sires de Saint-Verain, à l’instar de Saint-Pierre-du-Mont tout proche , ce qui explique notre intérêt, bien qu’il soit hors de notre périmètre. D’autres familles implantées en Donziais leur ont succédé.

Vendu en 1320 à Pierre Anceau, premier connu d’une lignée bourgeoise de Varzy, Villiers-le-Sec s’est transmis à ses descendants sur 15 générations jusqu’à Jacques Gabriel de La Ferté-Meung, officier général et diplomate, dont nous avons rencontré la famille, éteinte au XIXème siècle, en plusieurs sites – voir sa généalogie dans la page familles  -.

Les deniers titulaires de Villiers-le-Sec auraient eu un petit château à Cuncy-les-Varzy, tout proche, dont ils étaient également les seigneurs. Cette terre fut vendue comme « Bien de la Nation ».

Cuncy-les-Varzy, église Saint-Martin

Voyez ci-dessous une notice décrivant la dévolution de ce fief épiscopal.

Villiers-le-Sec. (V1 du 6 nov 2023)

 

 

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La forteresse de Giry

(Illustration : armes des Veilhan)

Nous poursuivons la découverte de sites médiévaux proches du Donziais avec le château de Giry, dans la haute vallée de la Nièvre d’Arzembouy, qui est l’une des belles forteresses du Nivernais.

Le fief relevait de Montenoison et des sires de Giry sont cités depuis les temps les plus reculés de la féodalité. Il avait des arrière-fiefs dans le voisinage, dont Montigny et Gipy, dans la même paroisse.

Le seigneur de Giry étant entré au monastère de Seyr (La Charité) le fief revint aux comtes de Nevers au XIème siècle. Le comte Guillaume II le donna à Hugues de Thil, son fameux Sénéchal, compagnon de ses expéditions en Terre Sainte, en 1146.

On trouve Giry au début du XIIIème aux mains des puissants sires de Thianges qui détenaient également Rosemont et bien d’autres lieux, pendant plusieurs générations.

Il passe par acquisition aux sires de la Rivière (branche de Champlemy) au XVème, divisé alors en deux parties, puis aux Veilhan qui s’identifieront au site pendant 200 ans avant de le vendre aux Choiseul-Chevigny, sgrs de La Rivière à Couloutre.

C’est dire combien la dévolution de Giry, proche géographiquement du Donziais, nous intéresse.

                             

Le château lui-même, des XIVème-XVème et XVIème siècles, est un monument imposant, qui surplombe la vallée depuis un escarpement, avec des éléments architecturaux originaux. De plan barlong il était entouré de quatre tours rondes, dont seules deux subsistent, avec un porche fortifié. Le corps de logis du XVIème siècle au décor gothique, dû aux Veilhan, comprend une tourelle hexagonale accostée d’une magnifique galerie couverte en encorbellement, unique dans la région.

Voyez ci-dessous une notice qui décrit la succession des seigneurs de Giry. Merci de nous aider à en éclairer les zones d’ombre…

Giry (V1 du 4/1/23)

 

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Arthel et la Motte d’Arthel

Poursuivons notre exploration de l’histoire de quelques vieilles forteresses aux abords immédiats du Donziais, dont l’histoire est souvent liée à celle de notre baronnie.

Arthel, dans la châtellenie de Montenoison, était une terre importante appartenant aux comtes de Nevers, inféodée dès le XIème siècle à des seigneurs particuliers qui en portèrent le nom – éteint au XVème siècle -. Plusieurs furent titulaires de la vicomté de Clamecy.

Arthel était réputé avoir été donné à son église par un évêque de Nevers du IXème siècle : Eumène. Les familles qui se succédèrent sur place après les sires d’Arthel sont bien connues de nous dans plusieurs sites de l’ancienne baronnie de Donzy. Deux châteaux existent à Arthel, à faible distance : La Motte-d’Arthel, aujourd’hui un domaine agricole qui conserve des traces de l’ancienne forteresse féodale, et Arthel, où un ambitieux et élégant édifice du XVIIIème siècle a remplacé l’ancien château du XVIème, dont il conserve quelques éléments. Ces deux sites correspondent sans doute à la division du fief d’Arthel en deux parties dans le cadre de la succession des seigneurs d’origine.

L’une est citée dès la fin du XIVème siècle aux mains de Guillaume Lamoignon, sgr de Nannay – voir cette notice et celle consacrée à cette famille -. Elle passa par alliance aux Pernay, sgr de Port-Aubry et de Suilly-Magny et échut par échange à Jean de Chabannes, sgr de Saint-Fargeau, cte de Dammartin, maréchal de France, dont les héritiers la revendirent sans doute dans des conditions qui restent à établir.

L’autre fut dans les mains de Dreux de La Forêt – frère de l’archevêque de Rouen, Cardinal et Chancelier de France, Pierre de La Forêt – à la même époque et passa par alliances aux Longueville, et surtout aux Paris, déjà rencontrés. Ils tinrent le fief pendant deux siècles avant de le revendre au XVIIIème siècle à des bourgeois parisiens enrichis par leurs charges judiciaires prestigieuses, les Guynet, originaires du Maine, reconstructeurs du château. Ces derniers revendirent Arthel aux Fournier de Quincy avant la Révolution, dont la postérité a conservé Arthel jusqu’à nos jours.

Voyez ci-dessous une notice qui tente d’éclaircir les étapes de la dévolution complexe des deux parties d’Arthel jusqu’à la Révolution. Les compléments que vous pourriez apporter seront les bienvenus pour en documenter les phases obscures….

Arthel   (V1 du 15 déc 2022)

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Chazeuil, un arrière-fief de Corvol-d’Embernard

(illustration : armes des sires de Mello)

La terre de Chazeuil était un arrière-fief de Corvol-d’Embernard, mais il semble qu’une autre partie relevait directement de Nevers (chât. de Montenoison). Elle n’était donc pas en Donziais mais toute proche géographiquement et par certains de ses détenteurs.

Car Corvol, détenu comme bien d’autres terres en Nivernais et Donziais par les sires de Mello, puis par leurs descendants (Beaujeu, Dreux, Thouars), fut vendu au grand Bureau de La Rivière, premier chambellan par Simon et Pernelle de Thouars. La seigneurie passa à son fils Charles, comte de Dammartin, puis à Antoine de Chabannes avec ce comté, et à son fils Jean, Maréchal de France. Elle revint par échange aux sires de la Rivière, branches de Champlemy, puis de Tonnerre et de Quincy, qui la vendirent vers 1660. Elle fut revendue à Michel Frémin, bourgeois de Paris, titré « baron de Corvol-d’Embernard, sgr de Chevannes, la Noue, St-Martin-des-Vaux, Chazeuil et dépendances » ; substitut du Procureur général du Parlement de Paris, Trésorier (1674), puis Président des Trésoriers de France à Paris (1698). Corvol passa ensuite par alliance aux Faultrier puis aux Boulard avant la Révolution. Tels furent les seigneurs de Corvol-d’Embernard, suzerains de Chazeuil.

Il existe quelques traces anciennes de la détention de ce fief, notamment dans l’Inventaire de Marolles (titres de la châtellenie de Montenoison), mais elles ne permettent pas d’en appréhender la dévolution complète, d’autant que le fief était divisé en deux parties, l’une relevant en arrière-fief de Corvol et l’autre directement de Nevers. Les choses se précisèrent au XVIIème siècle seulement, quand Chazeuil fut détenu par une famille d’hommes de loi du Donziais, les Jarreau, par acquisition certainement.

Sur place, à quelque distance du village, le « domaine de Chazeuil » recèle des traces – dont un pigeonnier – de l’ancien château féodal dit « d’en bas », par opposition à la gentilhommière du XVIIIème siècle proche de l’église, le « château d’en haut ». Ce dernier fut la demeure des seigneurs de Fourillon (domaine situé à 1km au nord-est), terre associée à Chazeuil, dont elle a peut-être été détachée. Localement il fut aussi appelé « château des Pâtis », du nom de ses propriétaires – les Despatys – avant la Révolution.

 Voyez la notice ci-dessous consacrée à la succession des seigneurs de Chazeuil. Merci de vos indications pour l’améliorer !

Chazeuil (V2 du 19/12/22)

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Pilles à Couloutre, et Roger de Piles…

(Illustration : le lavoir de Varzy, sur la Sainte-Eugénie)

Sur la rive droite du Nohain à Couloutre, le hameau de Pilles est un ancien fief. On le trouve cité chez les sires de La Rivière – dont il devait être un arrière-fief – au XVIème siècle : n’aperçoit-on pas les tours de leur château sur la hauteur ?

Ainsi Charlotte de La Rivière (°v.1535), « dame de Pilles », fille de Jean, sgr de Champlemy et de Seignelay, et d’Isabeau de Dinteville ; ou plus tard Hubert de La Rivière (+1615), sgr de Champlemy, vcte de Tonnerre et sgr de Pilles, qui réunit par son mariage deux branches de la famille, puis son fils Claude, baron de La Rivière (+1661). On peut supposer que Pilles resta ensuite associé au fief principal et passa aux Choiseul-Chevigny en 1665 par le mariage de Paule de La Rivière, ultime représentante de cette grande famille (voir : La Rivière, source d’une grande famille).

Pourtant ce hameau où ne subsiste pas de trace castrale, hormis un domaine qui paraît ancien au centre du village, est supposé avoir donné son nom à la famille de Roger de Piles (1636-1709), diplomate du roi Louis XIV, peintre et théoricien de l’art, dont les ancêtres habitaient notre région et y avaient exercé différentes charges.

Des généalogies complètes ont été données par Léon Mirot (Généalogie de la famille de Piles), ainsi que par Dugenne dans son dictionnaire biographique de l’Yonne. Elles ne la relient pas au fief éponyme, qu’on suppose simplement être leur origine eu égard à leur présence dans le voisinage dès le XVème siècle. Les sources font actuellement défaut pour approfondir la question.

La famille détenait des terres dans la région de Varzy : Champsimon, Bazarnes, et Chivres, à Courcelles, peut-être par une alliance. Le nom de Champsimon a disparu, fondu sans doute dans Chivres ou transformé en Chaumont (le nom d’un moulin). Ces fiefs relevaient de la châtellenie de Montenoison selon l’Inventaire des Titres de Nevers, c’est-à-dire de cette partie méridionale de l’ancien diocèse d’Auxerre qui n’appartenait pas à la baronnie de Donzy. Certains auteurs les rattachent au contraire à celle de Billy-sur-Oisy, fusionnée avec Corvol-l’Orgueilleux. On trouve aussi les Piles possessionnés en Avallonais et à Saulieu, sans doute par des alliances.

Nous les avons rencontrés en étudiant la dévolution de Bazarnes, avec son beau château reconstruit au XVIIIème siècle au bord de la rivière Sainte-Eugénie qui court  vers le Sauzay et  Clamecy.

La filiation est établie depuis Pierre de Piles (+1453), qui demeurait à Entrains. La famille appartenait à la bourgeoisie urbaine et ses membres étaient échevins de Clamecy ou de Saulieu.

Plusieurs d’entre eux ont exercé des charges ecclésiastiques locales ou parisiennes. Ainsi Pierre de Piles, qui étudia à Paris, devint Chanoine de Saulieu et d’Auxerre, chantre de la collégiale Saint-Martin de Clamecy – où il accueillit le roi François Ier en 1530 -. Il fut également Trésorier du chapitre de Varzy, et curé de Treigny (1520-1534) dont il embellit considérablement l’église – surnommée la « cathédrale de la Puisaye » – en faisant reconstruire le choeur. On peut y voir ses armes, comme sur sa pierre tumulaire avec son effigie gravée en la cathédrale d’Auxerre : « d’azur à la fasce d’argent, accompagnée de deux roses d’or… ».

Son petit-neveu Jean de Piles (+1607), fut chanoine de Paris, vicaire général de Reims sous l’archevêque Louis de Lorraine. Profitant de l’influence des Lorrains il fut gratifé de plusieurs bénéfices : doyen de Carrenac en Quercy, prieur de Lurcy et de Plessis-les-Moines, abbé d’Orbais en Normandie (1580). Il fut Secrétaire de la chambre du roi Henri III, Aumônier de la Reine Louise, et Député du clergé aux Etats-Généraux de 1593. Partisan des Guise et adversaire acharné des huguenots, il joua un rôle diplomatique important au service de la Ligue, qui l’envoya comme émissaire à Rome à plusieurs reprises avant 1600, où il plaida contre l’absolution du Roi après sa conversion.

Dans le contexte de la réconciliation, marqué par ses combats perdus il opta pour l’oubli, ce qui permit sans doute l’anoblissement de son frère Jacques (1542-1607), sgr de Champsimon, échevin d’Avallon et Président de l’Election de Clamecy, qui avait contribué à la pacification du Nivernais aux côtés des Gonzague. Sa plaque tumulaire dans la cathédrale Notre-Dame de Paris a été reproduite dans la collection Gaignères.

Un peu plus tôt, un certain Pierre de Piles de Villemur, lui aussi chanoine de Paris, ancien précepteur du duc de Guise, avait été également très engagé contre les huguenots. Il demeurait au cloître Saint-Germain-l’Auxerrois, avait accueilli chez lui les assassins de l’amiral de Coligny avant leur forfait (1572), et les avait aidés arme à la main. Mais ce nom de Villemur interroge : appartenait-il à cette lignée nivernaise ou à celle des Villemur de Paillès, d’où la confusion ?

Revenons enfin à Roger de Piles, dernier de cette famille et le plus connu.

                                                                 

Né en 1636 à Clamecy, où son père, Adrien, sgr de Courteilles, un autre petit fief de la paroisse de Courcelles (fils de Jacques ci-dessus) était Contrôleur du Grenier à Sel, il eut pour parrain le duc de Bellegarde, Grand Ecuyer de France, en exil à Entrains. Il étudia la philosophie, la théologie et surtout la peinture. Il fut précepteur de Michel Amelot, marquis de Gournay, qui l’emmena ensuite dans ses ambassades où il fit merveille. Envoyé en mission secrète au Pays-Bas par Louvois, il y fut arrêté et ne retrouva la liberté qu’en 1698, après la Paix de Ryswick. Il avait approfondi ses connaissances artistiques au cours de ses voyages et fut dès lors connu comme peintre, notamment portraitiste. Mais il fut surtout un théoricien de l’art et participa aux débats de son temps, défendant les « coloristes » et inventant l’expression « clair-obscur ». Membre de l’Académie royale de peinture et de sculpture, admirateur de Rubens, il publia plusieurs ouvrages sur la vie des peintres et un cours de peinture. Il mourut en 1709 et fut inhumé à Saint-Sulpice.

Reste à éclaircir le mystère de leur nom, que les historiens du Nivernais attribue au hameau de Couloutre. Merci de vos contributions à ce sujet !

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