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Le « Nobiliaire de Nivernois » de Villenaut

Parmi les sources qui permettent d’approcher les seigneurs de l’ancien Donziais, le « Nobiliaire de Nivernois » d’Adolphe de Villenaut (1836-1897), consacré aux « Familles de gentilshommes fixées en Nivernois et y étant en possession de la noblesse avant 1560, avec notices nivernaises de leurs alliances » (chez Vallières à Nevers, 1900) réalisé avec la collaboration de M. de Flamare, archiviste du Département, tient une place essentielle.

                                                      

Son auteur était éminemment donziais, étant issu d’une famille établie au XVème siècle en Puisaye. Le premier échelon connu fut un Regnault Mullot (+ avt. 1522), capitaine de Druyes, à qui la comtesse de Nevers attribua des terres, peut-être à l’occasion de son mariage avec une de ses Dames d’Honneur. Nous avons rencontré cette famille au Colombier (à Etais-la-Sauvin), qu’ils ont toujours détenu, ou à Maupertuis près de Druyes.

Ils portaient « d’azur à la bande d’argent chargée de trois coquilles de gueules, accompagnée de deux étoiles d’argent, l’une en chef, l’autre en pointe ».

                                                                     

Avec le temps le nom de la terre de Villenaut (aujourd’hui Les Villenots, un hameau d’Etais proche du Colombier) prit le pas sur le nom d’origine. Adolphe était le descendant direct à la neuvième génération de Regnault. Il avait eu une formation d’ingénieur des Arts et Manufactures et vécut à la fin de sa vie au château de Vauzelles, aux portes de Nevers.

Généalogiste nobiliaire du Nivernais, très documenté, il fut le digne héritier de l’abbé de Marolles, auquel il se référa constamment.

Il consigna les résultats de ses recherches dans cet ouvrage ambitieux, dont un seul tome, le second, consacré aux familles dont les noms commençaient par les lettres A à N, a été publié peu après sa mort. Un premier volume devait être consacré à un Historique du Pays de Nivernois, qui ne parut jamais.

Ce recueil est composé de notices consacrées à des lignées anciennes du Nivernais, auxquelles sont adjoints des notices plus courtes sur des familles alliées et un riche appareil de notes. Malgré quelques hypothèses que des travaux ultérieurs ont pu remettre en question, cet ouvrage reste la référence pour les généalogies traitées.

Le choix des notices principales peut paraître hétérogène. Ainsi on y trouve mis sur le même pied les Lamoignon et les sires de Mello ; les fameux Chabannes ou les anciens seigneurs de Lormes, sont présentés en note. Mais cette noblesse était effectivement diverse, et la vision de l’auteur était celle d’un érudit de la fin du XIXème siècle, influencé par ses contemporains malgré une quête évidente de vérité.

Un beau décor dans le goût de 1900, et une mise en page grand format, donnent à cet ouvrage un charme particulier. Il est aujourd’hui presque introuvable, mais il a été numérisé et on peut se procurer facilement une réimpression. Il est accessible en ligne sur Gallica : Nobiliaire de Nivernois.

                                            

 

Villenaut présente les générations, les mariages, les fratries, les titres et les fiefs, relie les lignées entre elles et renvoie de l’une à l’autre. Il déroule une sarabande de familles, survolant les vallons du Nivernais et les siècles. Cette cohorte nous devient familière malgré le nombre, et son travail imprègne nos articles.

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Duc de Donzy ?

Lu dans les Mémoires de Saint-Simon « M. de Donzi, hors d'espérance d'être duc, avait cherché à y suppléer par un mariage. Il le trouva dans la fille aînée de J.-B. Spinola, gouverneur d'Ath et lieutenant général des armées de Charles II, roi d'Espagne, qui en 1677 le fit faire prince de l'empire et le fit enfin grand d'Espagne, de la première classe pour un gros argent qu'il paya. Il n'eut point de fils, il n'eut que deux filles dont l'aînée eut sa grandesse après lui, et que Donzi épousa, et prit d'elle, en se mariant, le nom de prince de Vergagne. Il fallait craindre, à la vie qu'il menait, de se méprendre et de dire Vergogne… »

Qui pouvait bien être ce sulfureux M. de Donzi, alors que la lignée de ce nom s’était fondue dans celle de Nevers en 1199 ? C’est une longue histoire.

Comme nous l’indiquons dans les pages consacrées à l’histoire de la baronnie de Donzy, ce fief ne disparut que dans la nuit du 4 aout 1789. Certes, depuis le mariage d’Hervé IV et de Mahaut de Courtenay, Donzy n’était plus le titre principal de ses descendants. Mais Nivernais et Donziais subsistaient côte à côte comme des grands fiefs distincts.

Les comtes successifs de Nevers, bien qu’appartenant à des maisons princières (Bourbon, Bourgogne, Flandre, Clèves) conservèrent précieusement le titre de « baron de Donzy ». Il existait bel et bien, et marquait le contrôle d’un territoire connu de temps immémoriaux sous ce nom, entre Nevers et Auxerre. Au-delà des revenus qu’assurait cette baronnie, on puisait alors sa légitimité dans ces références anciennes, qui faisaient courir les plumes des notaires.

Le partage de la succession de Jean de Bourgogne (1415-1491), duc de Brabant et comte de Nevers – petit-fils de Philippe Le Hardi – avait même séparé Donzy de Nevers pendant quelques décennies au début du XVIème siècle, confirmant sa singularité préservée.

François Ier de Clèves (1516-1562) fut le premier duc de Nevers (1539). Ses succès militaires et la faveur royale lui avaient permis d’obtenir cette dignité et celle de Pair de France. Il obtint ensuite l’incorporation de Donzy à son duché-pairie (1549-1553), lorsque la baronnie lui revint. Il fut dès lors, et ses successeurs après lui « duc de Nevers et de Donzy ».

                                                         

Donzy entrait avec Nevers dans sa période "italienne". Son gendre et successeur, Louis de Gonzague, Pce de Mantoue (1539-1595) et les descendants de ce dernier, furent appelés « ducs de Nivernois et de Donziois ».

Charles II de Gonzague (1629-1665) vendit le duché au Cardinal Mazarin en 1659. Celui-ci en fit aussitôt (1660) don à son neveu Philippe Mancini (1641-1707), capitaine des Mousquetaires du Roi, qui fut Gouverneur et Lieutenant général du Nivernais pour le Roi, alors que le Parlement, trouvant sans doute cette intégration un peu rapide, refusait d’enregistrer son duché. Il était le frère de la belle Marie Mancini dont le jeune Louis XIV s'était épris. Il avait épousé une héritière nivernaise, Diane Damas de Thianges, nièce de Mme de Montespan.

                            

François Mancini-Mazarini (1676-1768) son fils, d’abord titré marquis de Donzy, suivant un usage du temps, fut Prince de Vergagne et du Saint-Empire, Grand d’Espagne de première classe, puis duc de Nevers et de Donzy quand il put enfin faire enregistrer par le Parlement de Paris le duché que lui avait légué son père (1720). C’est le fameux « M. de Donzi » de Saint-Simon.

Son fils Louis-Jules (1716-1798), dernier duc de Nivernais et de Donziais – dès 1730 par démission de son père – fut un personnage remarquable des règnes de Louis XV et de Louis XVI, qu’il servit comme ambassadeur à Rome, Berlin et Londres. Il était le gendre de Pontchartrain, ministre de Louis XIV. Ecrivain et poète, il fut aussi membre de l’Académie Française.

                                                                

Ainsi Donzy, revenu sur le devant de la scène des grands titres nobiliaires, terminait sa longue carrière féodale en beauté.

 

 

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Donzy et Saint Germain d’Auxerre

(illustration : tombeau de Saint Germain, à Auxerre)

L’ombre tutélaire de Saint Germain (380–448), haut dignitaire de l’Empire, puis 7ème évêque d’Auxerre à partir de 418, plane sur le Donziais où sa famille possédait, dit-on, de grands biens dont il fit don à son église.

Il était contemporain de Saint Augustin et de Saint Jean Chrysostome, mais aussi, plus proches de nous, de Saint Aignan d'Orléans et de Saint Martin de Tours. Il rencontra à deux reprises Sainte Geneviève, à Nanterre (430), où sa famille – de statut comparable à la sienne – résidait, puis à Lutèce (447), dont elle incarna la défense contre les Huns.

Ses parents, Rusticus et Germanilla, appartenaient à l’aristocratie gallo-romaine du pagus auxerrois, et résidaient dans leur villa d’Appoigny, où il naquit. Il fit des études poussées, sans doute à Autun, et devint un juriste réputé, ce qui lui valut d’être nommé gouverneur de plusieurs provinces romaines, dont celle des Senons. Il s’y comporta alors comme un puissant seigneur de son temps, choquant l’évêque Amâtre par ses violences de chasseur notamment.

Pourtant il s’imposa comme son successeur, fut ordonné par lui, puis sacré évêque en 418, renonçant alors à ses habitudes anciennes. Sa femme, Eustachie, qui appartenait elle-aussi à une riche famille, devint dès lors « sa sœur » suivant l’expression limpide de Constance de Lyon, lettré gallo-romain ami de Sidoine Appolinaire, qui fut son premier biographe (480).

Outre son action à la tête de son diocèse et ses nombreuses fondations, Germain est surtout connu pour les deux missions qu’il effectua en « Bretagne » (Angleterre) à la demande du pape pour lutter contre l’hérésie pélagienne et rétablir la paix, avec Saint Loup, évêque de Troyes en 430, puis avec Saint Sevère, évêque de Trèves, en 448. Il s’arrêta à chaque fois au bord de la Seine sur son trajet, où il rencontra Geneviève.

Il mourut à Ravenne, capitale de l’empire romain d’occident finissant, où il était allé rencontrer Aétius, généralissime sous Valentinien III, en 448.

                                        

                                        Ravenne, mosaïque du Mausolée de Galla Placidia 

Son corps fut ramené en grande pompe à Auxerre, accompagné de cinq jeunes vierges : Pallade, Magnance, Porcaire, Camille et Maxime, qui ont laissé leurs noms à des villages des environs. Germain fut inhumé sur le Mons Autricus, où il avait fondé un oratoire dédié à Saint Maurice, et où s’éleva plus tard la grande abbaye bénédictine qui porte son nom. Son tombeau y est toujours visible dans la crypte du IXème siècle, haut lieu symbolique de l’histoire de l’église d’Auxerre.

Voyez dans le fichier ci-joint une biographie plus complète :

                                                       Vie de Saint Germain d'Auxerre

On peut aussi lire :

– La « Vie de Saint Germain d’Auxerre » de Constance de Lyon (éd. et trad. par René Borius, au Cerf, 1965, réédité par Sources Chrétiennes)

– « Les Gestes des Evêques d’Auxerre » sous la direction de Michel Sot (Tome 1, Les Belles Lettres, Paris 2006).

– En bibliothèque historique : « La vie, les vertus et les miracles du grand Saint Germain, évêque d’Aucerre » par Dom Georges Viole, religieux bénédictin de Saint-Maur (chez Gilles Bouquet, à Aucerre, 1656)

– En ligne sur Gallica, le passage qui lui est consacré par l’abbé Lebeuf dans ses « Mémoires concernant l’histoire civile et ecclésiastique d’Auxerre et de son ancien diocèse » (pp. 31 à 109)

– « Saint Germain d’Auxerre » par Jean-Pierre Soisson (Rocher – Desclée de Brouwer, Paris 2011)

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De nombreux liens unissent ce grand saint à Donzy, que nous avons évoqués au fil de nos articles, directement ou indirectement.

Se référant à sa biographie, on considère que la terre de Vergers (com. de Suilly-la-Tour), en aval de Donzy, appartenait à sa famille et qu’il en fit don à son église. Ce point est discuté : certains auteurs estiment que le Vercisum de la Geste, correspond plutôt à Varzy, grande terre et château des évêques d’Auxerre en Nivernais, apportée par Germain. Mais Varzy est aussi expressément nommée.

Quoiqu’il en soit, une église primitive en l'honneur de Saint Germain fut construite par Saint Pallade, évêque d'Auxerre (+ 658) à Vergers dès le VIIème siècle. Remplacée par un édifice de la fin du gothique, elle fut longtemps l’église paroissiale de Suilly-Vergers. On peut toujours la voir, un peu transformée, dans le parc du château.

Cette tradition galllo-romaine, la présence de cette église, et les solides fondations de l’ancien château-fort de Vergers, encore visibles, confèrent à ce site une aura historique unique en Donziais, malgré la reconstruction néogothique.

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Mais ce sont surtout les dépendances de l’abbaye bénédictine Saint-Germain d’Auxerre, dont l'essor fut remarquable, qui retiennent l’attention. Le Donziais appartient incontestablement à l’aire d’influence de ce grand monastère qui marqua de son empreinte la vieille cité, capitale jusqu’à la Révolution de toute cette région septentrionale du Nivernais.

Le monastère primitif de Cessy-les-Bois, tout proche de Donzy, dédié à Saint Baudèle (ou Baudile) de Nîmes, a été rattaché de façon précoce à l’abbaye, qui imposa très tôt son influence. Il conserva cependant un statut assez autonome, avec un abbé et non un prieur. A ce point de vue, Saint-Germain d’Auxerre n’eut jamais l’ambition unificatrice de Cluny, et n’accepta d’ailleurs pas complètement, le moment venu, de s’y soumettre elle-même. Haymon d’Auxerre (+ 865), moine lettré, maître de l'école de Saint Germain, fut abbé de Cessy.

Le prieuré de Moutiers-en-Puisaye, de très ancienne fondation, étape sur le chemin de Rome pour les pèlerins bretons, en relevait également. Ces deux monastères ont presqu’intégralement disparu sous l’assaut des troupes protestantes vers 1560-1570, et avaient perdu toute activité religieuse bien avant la Révolution.

A Donzy même, le prieuré de Notre-Dame du Pré, fondé au tout début du XIIème siècle – là-même où une église du VIIème siècle fut à l'origine de Donzy (Donzy-le-Vieux) – était initialement rattaché à Saint-Germain d'Auxerre. Mais ce statut évolua quand le baron Hervé II décida, quelques années plus tard, de le donner à Cluny qui connaissait alors un développement extraodinaire et entendait imposer sa réforme monastique à l'ensemble des monastères bénédictins. Encore faut-il rappeler les liens de famille qui unissait les sires de Donzy à la grande abbaye bourguignonne : son prestigieux abbé Saint Hugues (1024-1109), qui y régna pendant 50 ans, appartenait à la branche aînée des sires de Semur, très engagée dans l'essor monastique bénédictin en Bourgogne.

L’église romane du prieuré bénédictin de Saint-Verain, parvenue presqu'intacte jusqu'à nous, était aussi dans la dépendance d’Auxerre. Elle accompagna l’essor d'une grande dynastie baronniale de ce nom au nord-ouest de l'ancien diocèse.

Ne l'oublions pas : le Donziais appartenait à l'espace Auxerrois et à celui de Germain, dont le nom fut d'ailleurs largement utilisé dans la contrée.

Merci d'apporter vos contributions à l'évocation de ces liens.

 

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La valse des noms…

Les relations entre noms de fiefs et noms de familles, du Moyen-Age à la Révolution, ont été complexes et évolutives. « L’inventaire des Titres de Nevers » de l’abbé de Marolles, est une source précieuse pour en apprécier la diversité.

L’étude des familles seigneuriales du Donziais que nous proposons sur ce site offre un panorama complet. Elle met en évidence une déconnection assez rapide des noms de familles et de terres, qui accompagne le passage progressif de la féodalité à un régime de propriété rurale classique. Mais les noms de fiefs connaitront un regain d'intérêt aux XVIIIème et XIXème siècles.

Le seigneur du Moyen-âge, soldat et justicier dans son fief, exprime sa fidélité à son suzerain – ici le baron de Donzy, puis le comte de Nevers – par un hommage. L’usage s’installe de l'identifier en associant à son nom – nos prénoms d’aujourd’hui : Jean, Geoffroy, Guillaume…– celui de sa terre : Geoffroy, baron de Donzy ; Jean, sire de La Rivière. Cette appellation devient progressivement, aux XIIème et XIIIème siècles, le nom de sa famille :  famille de Courvol, ou famille de Pernay.

Les cadets se voient dotés de fiefs secondaires, dont le nom identifie leur branche : Jacques de La Rivière, seigneur de La Garde (Perroy) ; Jean de La Barre, seigneur de Gérigny (La Charité), Hugues de Saint-Verain, sgr de la Maison-Fort (Bitry). Au fil du temps, ce nouveau nom est parfois substitué à l’ancien dans l’usage courant : M. de La Maison-Fort (famille du Bois des Cours).

Mais l’usage du nom d’une terre pour désigner une famille souffre de nombreuses exceptions. Il n’est pas rare que des familles anciennes tenant des fiefs importants soient connues sous de simples patronymes ou surnoms : ainsi des Le Muet, seigneurs de Corbelin (à La Chapelle-Saint-André), des Le Paulmier, seigneurs de La Rachonnière et des Granges (à Suilly), des Girard, seigneurs de Passy (à Varennes-les-Narcy), ou encore des illustres Damas, vicomtes de Druyes, de la même souche que les barons de Donzy eux-mêmes, dont le nom est issu du gallo-romain Dalmatius.

Certains fiefs paraissent n’avoir jamais donné leur nom à une lignée, ou bien sa trace est oubliée. La Motte-Josserand (à Perroy) – nommée ainsi par référence à Josserand de La Rivière son fondateur -, Vergers (à Suilly) ou Mocques (à Saint-Martin-sur-Nohain), sont dans ce cas.

Il y a beaucoup plus de fiefs que de familles nobles subsistant dans la durée : la plupart d’entre elles en détiennent donc plusieurs, proches ou plus éloignés – parfois même une liste imposante : ainsi François de la Rivière (+1536) est vcte de Tonnerre, sgr de la Rivière, Corvol-d'Embernard, Champlemy, Colméry, Ciez, Challement, Arzembouy, Sophin, vcte de Quincy, sgr d'Authiou, baron de Seignelay, et sgr de Lurcy-le-Châtel…-. Certains fiefs sont donc cités comme possessions complémentaires, ce qui n’exclut pas un château et un vaste territoire.

Au fil du temps la structuration féodale est devenue très complexe : un véritable écheveau de terres, de familles et d'allégeances s'est constitué, dont les fils sont ardus à dénouer. Par l’effet des partages et des alliances, des terres, même principales, sont détenues par des familles portant d’autres noms, venues parfois d’autres provinces : ainsi des Chabannes, seigneurs de Vergers, ou des Pernay, une lignée locale dont le fief d’origine (à Nannay) est passé à d’autres et qui s’est déplacée vers Cosne (Port-Aubry et le Magny à Suilly). Il arrive même qu’une famille donne son nom à un château, comme l’ont fait les sires de Menou, venus du Poitou, à Nanvignes au XVIème siècle.

 

Le seigneur des XVIème-XVIIème siècles continue à respecter les formes anciennes, comme en attestent les titres, et à détenir les droits traditionnels, mais il réside moins souvent sur place où il est simplement représenté, et s’allie dans d’autres provinces. Pour financer sa carrière militaire ou sa vie de courtisan, il cède des fiefs, notamment à la bourgeoisie montante, ou en acquiert de nouveaux avec les ressources que lui procurent ses « charges ».

Les noms des lignées et ceux des fiefs se différencient alors complètement. Il devient très rare que le seigneur d’un lieu en porte le nom : Henri de Morogues (en Berry) est seigneur de Fonfaye ; Jean d’Armes (près de Clamecy) est seigneur de Vergers. La Rivière fait exception : le fief reste entre les mains de la famille de ce nom jusqu’au début du XVIIIème siècle.

 

A la veille de la Révolution, le maître d’un château, toujours appelé « haut et puissant seigneur » dans les titres, et considéré comme tel par des " manants " plus ou moins affranchis, peut avoir des origines diverses. Il est rarement issu d’une lignée d’extraction chevaleresque, dont seuls quelques exemples subsistent. Il appartient plutôt à une famille parlementaire ou de la bourgeoisie d’affaires : ainsi des Lamoignon, qui possèdent de nombreux fiefs en Donziais et inventent même celui de « Lamoignon » à la sortie du bourg ; des Le Peletier, maîtres de Saint-Fargeau et de bien d’autres terres en Puisaye, ou encore des Nigot à Saint-Sauveur.

Le pouvoir féodal ancien, notamment judiciaire, s’est étiolé au profit des institutions ducales et royales, qui sont devenues largement compétentes. Il se concentre sur des questions d’économie rurale : le seigneur est devenu un simple « propriétaire ».

Pourtant il ajoute souvent à son patronyme bourgeois le nom d’une terre précédé d'une particule, pour le rallonger, et parfois même tenter de le faire oublier. Le XVIIIème siècle est l’heure de gloire de ces familles de la nouvelle noblesse : les Frappier de Montbenoit, ou les Maignan de Champromain.

Après l’épisode révolutionnaire au cours duquel on masque la particule pour échapper à l'opprobre ambiant ("M. Dubois-Descours"), la Restauration marque le grand retour de l'usage des noms de fiefs. Le regain des signes nobiliaires va même jusqu’à placer des particules devant des patronymes, les transformant en lieux imaginaires : les Damas d'Anlezy deviennent ducs "de Damas" ; ils n'avaient pourtant nul besoin de cet artifice.

Le chercheur moderne peine à s’y retrouver dans ce maquis. La succession à la tête des fiefs est difficile à appréhender si des sources précises ne sont pas disponibles. Leur importance réelle s'apprécie mal ex-post : tel grand château ne domine plus que quelques arpents ; tel petit manoir est à la tête d'une vaste propriété. Les plus grands noms peuvent se trouver « seigneurs d’un colombier, d'une crapaudière et d’une garenne » (Chateaubriand, Mémoires d'Outre-Tombe, tome 1), quand des bourgeois obtiennent l’érection d’une terre tout juste acquise, en marquisat.

Malgré nos recherches approfondies grâce à toutes les sources disponibles, cette confusion et cette difficulté sont à l’origine d’erreurs dans nos documents. Nous ne pourrons les corriger qu’avec votre concours, en particulier si vous avez accès à des archives locales ou familiales.

 

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BONNE ANNEE !

Bonne année à toutes les visiteurs du site, avec une mention particulière pour les contributeurs !

Que 2017 nous permette d'approfondir ensemble notre connaissance de l'ancien Donziais, qui éclaire notre passion partagée pour cette petite région, à la prospérité de laquelle nous sommes attachés !

Merci à l'avance de vos contributions à venir !

 

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