Figures donziaises dans la Révolution : Charles André Dupin

(Illustration : Varzy)

Nous connaissons les trois frères Dupin, dont les brillantes carrières sous la Monarchie de Juillet ont illustré leur Nivernais natal, qu’ils n’ont jamais délaissé et où ils se sont établis avec soin, à Corbelin, au Réconfort, à Chitry, et à Raffigny.

Leur père, Charles André DUPIN (1758-1843), magistrat à Clamecy, député, les avait précédés. Il avait participé aux débats de la Révolution : un homme du juste milieu, ouvert aux idées nouvelles sans rejeter l’ancien temps qui avait permis à sa famille de prospérer. Heurté par des excès dont il faillit être victime, peu attiré par les honneurs et attaché à son petit pays, il choisit finalement d’y revenir et d’y reprendre une vie de magistrat et d’administrateur. Au XVIIIème siècle on aurait dit : « un honnête homme ».

Charles André Dupin

Nous avons évoqué la Famille Dupin, originaire de Varzy, cité épiscopale auxerroise, dont une branche s’est implantée à Clamecy et en Donziais. Les Dupin appartiennent à la bourgeoisie ancienne : ils sont connus à Varzy comme avocats et magistrats (baillis) depuis la fin du XVIème siècle. Enrichis par leurs charges et grâce à de bonnes alliances, ils acquièrent des terres et des moulins à forge comme celui de Croisy sur le Sauzay. Le père de Charles André, André Dupin, déroge à cette tradition : il est un médecin estimé à Clamecy où il a épousé en 1754 la fille d’un notaire royal. Il en a été maire, nommé par le roi, en 1769.

Charles André quant à lui fait des études de Droit à Paris et revient s’installer à Clamecy comme « procureur du roi auprès du Grenier à Sel », à 20 ans (1779). La valeur et …le soutien familial n’attendent pas le nombre des années. C’est une charge importante en cette époque de contestation des rigueurs du monopole royal du sel. Le « Grenier à Sel » est certes un entrepôt comme son nom l’indique, mais c’est surtout une juridiction spécialisée. La vieille maison qui l’abritait a été détruite.

Clamecy – Le Grenier à Sel

Le jeune procureur épouse deux ans plus tard une cousine, Catherine Dupin, fille d’un bailli de Varzy, qui lui apporte notamment la petite terre de Cœurs à Marcy, non loin de Champlemy, achetée en 1670 aux Lamoignon par son grand-père. Il en aura les trois fameux garçons mais, signe des temps, divorcera. Avocat en Parlement (1783), puis Conseiller et Lieutenant particulier au Bailliage ducal de Clamecy (1785), il est aussi procureur-syndic en l’Election, et donc le principal magistrat ducal et royal de la ville.

La Salle du Manège (Tuileries)

En 1791, ce notable reconnu pour ses compétences est élu député à l’Assemblée Législative, 6ème sur 7 dans la Nièvre, avec un système électoral encore très élitiste puisqu’il n’y a que 250 électeurs dans le département. Il ne jouera pas un rôle politique marquant dans la Salle du Manège des Tuileries où se réunissent les députés. Les positions modérées ne peuvent se faire entendre au milieu des outrances. Ce « modérantisme » suspect lui vaudra même d’être emprisonné sous la Terreur à Nevers, puis au château de Pressures, près de Clamecy, transformé en prison pour les opposants. Finalement le soutien populaire qui lui est manifesté contraindra le Représentant en mission à le libérer (1794).

Représentant en mission

Il reprend peu après une carrière locale (1796), comme juge, comme Commissaire du Gouvernement au Tribunal de Clamecy, puis comme commissaire central près l’administration de la Nièvre (1798).

En 1799 il est élu député au Conseil des Anciens sous le Directoire, et entre sous le Consulat au Corps législatif, où il siège jusqu’en 1804.

Après avoir servi à l’Inspection générale de la gendarmerie, il revient à Clamecy où il est nommé procureur impérial près le tribunal de première instance (1806). Il exerce ensuite la fonction de sous-préfet de Clamecy (1815-1830). Il refuse constamment l’avancement qu’on lui propose pour se dévouer à sa petite patrie. Ainsi, il est nommé conseiller d’État en 1830, mais s’estime trop âgé et donne sa démission pour rester à Clamecy où il meurt le 21 novembre 1843.

Clamecy – La Sous-Préfecture

Un sage donc, conscient de ses limites, il aura simplement fait son devoir, y compris à la capitale, au milieu d’évènements qui le dépassaient sans doute. Attaché à sa vallée de l’Yonne et à sa ville, il laissera la gloire parisienne à ses fils.

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